Maison et parc des labyrinthes à Montendre

LE MYTHE DE DÉDALE

Françoise Choay, dans son Allégorie du Patrimoine nous rappelle que…

…”La première représentation du rôle anthropogénique de notre compétence d’édifier est proposée par la mythologie avec l’œuvre de Dédale, héros tutélaire des architectes. Son labyrinthe est l’édifice humain par excellence : Le mieux capable de capter la durée et de forcer l’espace à y différer son déploiement pour faire cheminer vers le sens ; le mieux susceptible d’initier à l’altérité humaine ; le plus redoutable aussi, qui piège ou bien libère, et dont on ne peut éprouver le pouvoir créateur qu’à condition d’y livrer ensemble, indissociablement, son intelligence et son corps.

À Montendre, le projet sollicite cette totalité indissociable de l’homme et propose au visiteur de la Maison et du parc des labyrinthes, de manière à la fois ludique et culturelle, la rencontre avec le labyrinthe, sa géographie, les sens et les valeurs philosophiques dont il est porteur, son histoire depuis la préhistoire jusqu’à nos jours ainsi que les émotions qu’il suscite.
Le site se situe sur la base de loisirs de Montendre dans sa partie ouest à proximité de la route départementale n°45, de part et d’autre du chemin rural qui le traverse et le distribue. La Maison des Labyrinthes occupe la rive sud du lac du baron d’Esqueyroux ; le parc des labyrinthes occupe un territoire d’environ huit hectares au sud du chemin rural.
Le projet articule le parcours du visiteur de part et d’autre du chemin rural, depuis le parking jusqu’au parc des labyrinthes en passant par le parvis, la Maison des labyrinthes et la jetée de liaison, cheminement progressif, ordonné et hiérarchisé, invitant à la découverte du site au fil d’une promenade qui se déroule dans un espace en trois dimensions balisé d’évocations du concept de labyrinthe et offrant dans sa progression au visiteur une perception d’abord fragmentée et séquentielle puis au final globale du site, et inversement.
La jetée constitue la colonne vertébrale du site, référent visuel pour tous, connectant l’ensemble des espaces du parc. Elle se déploie sur la plus grande longueur du site, entre le fond du parc des labyrinthes et sur les imites des prairies humides jusqu’au milieu du lac. Elle est ainsi visible de part et d’autre du lac, à l’ouest depuis la route départementale, à l’est depuis le cœur de la base de loisirs. Elle joue ainsi le rôle d’un signal pour la Maison et le parc des labyrinthes. Elle offre à chaque visiteur une « vue d’oiseau » du parc, de la Maison et du lac et leur permet ainsi de décrypter chacun des labyrinthes à thème avant d’y accéder et de s’y perdre.

L’approche de la Maison des Labyrinthes est une mise en scène rituelle d’un édifice symbole du labyrinthe. Un parvis de forme allongée se développe depuis le parking, interrompt le chemin rural de façon à signifier aux automobilistes la préséance des circulations douces dédiées aux piétons et aux cyclistes, et accompagne le visiteur jusqu’à l’entrée de la Maison des Labyrinthes.
L’espace du parvis est ponctué et animé par la jetée qui le croise à hauteur et sur laquelle on peut soupçonner la présence d’autres visiteurs. Il est bordé côté lac par le « ballet » qui l’encadre et construit son espace tout en proposant au visiteur une pause pour contempler le lac et ses abords avant d’entrer dans l’édifice.
Comme les autres équipements de la base de loisirs disséminés sur le site au bord de l’eau et entre les arbres, la Maison des Labyrinthes est conçue comme une folie empruntant au contexte sa typologie de cabane forestière ou de palafitte. Elle est implantée en retrait des berges du lac au-delà du chemin qui en longe la rive. En haut du glacis existant, elle ménage encore un espace qui laisse passer un nouveau sentier. Elle est construite pour l’essentiel en bois et hors sol de façon à préserver le substrat du sous-bois sur son emprise. Ce décollement de la topographie lui permet également d’offrir au visiteur une position privilégiée en balcon et une vue panoramique sur le lac.
Le plan de la Maison des Labyrinthes adopte la forme compacte du labyrinthe mythologique qui conjugue le plan carré avec le plan circulaire dont les angles arrondis l’inscrivent en douceur dans le sous-bois. Les labyrinthes qui nous ont inspirés sont ceux de Sainte-Catherine Hill à Winchester et de Somerton à Hanburry. Forme symbolique compacte et mystérieuse, la Maison des Labyrinthes est le lieu de l’expérience du labyrinthe mythologique du palais du roi Minos dont Dédalle s’évade par le haut en s’envolant. Cette expérience est offerte à tous les visiteurs par le biais d’un parcours en spirale – labyrinthe unicursal – qui se développe dans le patio de l’édifice amenant le visiteur du rez-de-chaussée de l’édifice au plancher de la jetée. Là encore, efforts physiques et prise de connaissance s’y côtoient, l’architecture y rencontre le mythe.

Encore Françoise Choay :

L’architecture est le seul art qui nécessite d’être parcouru : tours, détours, retours… parcours sont nécessaires à la perception de l’espace qui nous environne et à sa prise de connaissance. L’architecture est bien du registre du labyrinthe, dans cette dimension de parcours auquel elle nous convie ou nous oblige.

Le visiteur prend progressivement de la hauteur, dépassant progressivement l’expérience physique pour accéder à la découverte et à la connaissance du site.

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Date 2014
Surface 703 m²

Dédale — Quels édifices ont pu vous émouvoir ?

Les édifices ou les villes qui nous ont émus restent encore aujourd’hui en petit nombre. Pour les évoquer simplement,
ce sont notamment – pour ceux qui me reviennent en mémoire :
la Bibliothèque des livres anciens à Yale, la Chapelle
de Ronchamp, l’Église de Piétilä à Helsinki.