Les édifices ou les villes qui nous ont émus restent encore aujourd’hui en petit nombre. Pour les évoquer simplement,
ce sont notamment – pour ceux qui me reviennent en mémoire :
la Bibliothèque des livres anciens à Yale, la Chapelle
de Ronchamp, l’Église de Piétilä à Helsinki.
Le vieil Iluro
En quelque sorte au bout du monde, à l’entrée de la vallée d’Aspes…,
…dernière étape avant le franchissement des Pyrénées vers l’Aragon via le Somport, la ville des origines est construite au confluent des gaves qui se réunissent là, en belvédère fortifié face aux trois vallées qui y débouchent et face aux premiers sommets importants des Pyrénées. Là haut dans sa position retranchée autour de sa belle place ovale, le vieil Iluro semble avoir suspendu le temps, entre sa promenade des remparts confrontée à l’arrivée de orages, le parvis de l’église Sainte-Croix où plane encore le souvenir romantique de l’Abbé Menjoulet, son zélé restaurateur au temps de Prosper Mérimée. Dernier bastion vivifiant de ce promontoire, le collège des cordeliers domine aujourd’hui la ville et participe à sa silhouette caractéristique immortalisée par Artigarède, le célèbre pâtissier d’Oloron. Établi comme couvent vers 1250 par l’ordre franciscain qui lui donne son nom, devenu caserne militaire en 1791 puis transféré à l’état en 1904, le bâtiment lourdement remanié au fil des temps connait différentes affectations avant d’acquérir son statut de collège mixte en 1966. Ces quelques quarante dernières années d’activité n’ont pas ménagé les vieux murs et sa restructuration constitue un choix courageux alors même qu’il aurait été aisé d’abandonner le site pour construire un nouveau collège à ses pieds dans la plaine*.
Dans le respect de ce site visible à des lieues à la ronde et le périmètre protégé de l’église Saint-Croix, sa restructuration est entreprise dans le respect de ses enveloppes et ses extensions viennent occuper chacune de ses extrémités, la salle de théâtre accompagnant l’entrée en creux déportée en amont du côté du parvis de l’église et du vieux cimetière, la demi-pension et les deux logements de fonction occupant la partie basse en friche, dans une figure de cloître discrètement inscrit parmi les toitures d’ardoise de la ville haute comme si elle avait toujours existé à cet endroit là.
Entre ces deux extrémités, haute et basse, sur un dénivelé de quinze mètres environ, tout le fonctionnement du collège est revu autour d’un grand promenoir affirmé comme colonne vertébrale et fil d’Ariane déroulé entre cours et bâtiments, son parcours entre ombre et lumière est rythmé par ses arches restaurées, reconstituées et rajoutées, espace protégé propice à la méditation sur ce lieu de mémoire dignement cultivé et solidement ancré dans l’histoire de la cité.
* Florence Accorsi, septembre 2000.